Carte d'identité
Secteurs | Électroménager, Équipements médicaux |
---|---|
Naissance | 1891 |
Siège central | Amsterdam |
Chiffre d'affaires | 18,2 milliards d'euros |
Bénéfice net | -466 millions d'euros |
Production | 35 sites de production dans le monde |
Effectifs | 72.264 personnes |
Site web | http://www.philips.com |
Président | Roy Jakobs |
---|---|
Actionnaires principaux | (avril 2024): Exor NV (15, 25%), UBS Asset Management (2, 53%), Amundi Asset Management SA (1, 44%) |
Marques | Philips, Saeco, Senseo, Lumec |
Comité d'entreprise européen | oui |
Ratios 2023 |
|
---|---|
Marge opérationnelle % | -0,63 |
Taux de profit % | -3, 87 |
Taux de solvabilité % | 58, 49 |
Part salariale % | 85, 11 |
Taux de productivité (€) | 112.241 euros |
Fonds roulement net (€) | 1, 6 milliards |
Observatoire des Comptes
Actionnariat du groupe 2024
Voir les données : Tableau
Télécharger les données : csv
Actionnariat et contours
du groupe en Wallonie
Historique
Les frérots Philips (Gerard et Anton) se retourneraient sans doute dans leur tombe s’ils venaient à voir ce que leur petite entreprise de fabrication d’ampoules électriques, établie en 1891 à Eindhoven (Pays-Bas), est devenue aujourd’hui : un combinat transnational multimillionnaire dont la gamme de produits va de l’imagerie médicale à la brosse à dents en passant par… la bonne vieille ampoule, mais revue et corrigée "high tech", normes "climatiques" obligent. On en dira de même sans doute des + de 40 ans qui, avec un brin de nostalgie, gardent en mémoire l’écusson Philips ornant le vieux poste de radio et bien souvent le téléviseur : en 2011 Philips enterre définitivement sa ligne de production de téléviseurs (cédée au taïwanais TPV Technology), dont il était, pour mémoire, le dernier fabricant en Europe. À ce titre, Philips n’a joué qu’un petit rôle de figuration et d’appoint dans la désindustrialisation du continent, il n’y avait qu’à suivre le mouvement.
Erik Rydberg*
Philips 2015 n’est pas Philips 1891. En 2015, observe la presse financière [1], Philips sort d’une année "misérable", avec un revenu net 2014 en chute libre (-66%), des déboires aux États-Unis (fermeture de l’usine de scanners médicaux à Cleveland sur fond d’un litige en violation de brevets) et, pour tenter de rattraper la "sauce", un énième "plan stratégique" consistant, cette fois, à scinder la société en deux entités distinctes, l’une pour la branche "produits de santé" et, l’autre, pour l’éclairage, sans doute assorti d’apports de capitaux frais par introduction en Bourse. Les "marchés" (analystes bancaires et boursicoteurs) ont accueilli la nouvelle avec un scepticisme bienveillant.
En chiffres, Philips se présente ainsi en 2013 [2] :
{{}} | CA (Mia€) | % | Sites prod. | % | Sites RD | % | Emploi | % |
Asie-Pacif. | 7,4 | 31,9 | 25 | 22,5 | 13 | 22,0 | 40.438 | 35,3 |
Emea | 7,4 | 31,8 | 40 | 36,0 | 21 | 35,6 | 41.829 | 36,5 |
AmérLat | 1,4 | 6,2 | 6 | 5,4 | 3 | 5,1 | 3.189 | 2,8 |
AmérNord | 7,0 | 30,2 | 40 | 36,0 | 22 | 37,3 | 29.233 | 25,5 |
Total | 23,3 | 100 | 111 | 100,0 | 59 | 100,0 | 114.689 | 100,0 |
Emea ? S’y habituer signifie : Europe, Moyen-Orient et Afrique (un des moyens, dans les rapports annuels, de noyer le poisson, rendre les choses opaques…).
Philips est d’évidence une grosse boîte. Plus de 100.000 travailleurs et une présence sur presque tous les fronts, un gros tiers des activités demeurant dans la sphère européenne d’origine. Le passage de l’ampoule au médical (éminemment lucratif, car largement financé sur fonds publics) témoigne d’un esprit de méthode : ce qui paraît d’un bon rendement, on achète, clé sur porte. Fin 2014, ainsi, rapporte le Financial Times déjà cité, Philips annonçait le rachat, pour 800 millions de dollars (quelque 700 millions €), du groupe étatsunien Volcano, qui produit des appareils permettant aux médecins de voir à l’intérieur des veines des patients.
C’est ainsi que Philips s’est développé, non tant sur ses propres forces, mais sur celles des autres. Coup d’envoi en 2007 avec l’achat de l’entreprise américaine Health Watch, spécialisée dans le matériel de surveillance médicale. C’est, pour reprendre le terme évocateur, de l’économie casino. Un rapide tour des quelque 200 dépêches que le site des métallos 6com a publié au sujet de Philips entre 2001 et 2014 l’indique bien. Ce qui paraît coûteux, Philips délocalise : en 2002, les aspirateurs et percolateurs vers la Pologne ou l’Ukraine ; en 2003, les semi-conducteurs vers Taiwan, et le développement de logiciels en Inde, de même que des services financiers et administratifs, vers la Pologne ; en 2005 et 2012, une bonne part des ampoules néerlandaises, encore vers la Pologne.
En 2003, la déclaration avait fait du bruit. En plein mois d’août, la direction de Philips annonçait son intention de fermer ou de vendre un tiers de ses usines, 50 sur 150 (voir le tableau plus haut : c’est quasi mission accomplie), aveu embarrassant dont la direction s’est sortie par un démenti – en ajoutant toutefois que "les usines du groupe devront faire la preuve, une par une, de leur rentabilité" [3]. C’est la nouvelle philosophie managériale des ’centres de coûts’ : les profits sont consolidés et les usines ne font plus figure que de boulets où se concentrent les ’coûts’.
Tantôt délocaliser, tantôt "externaliser", tantôt opter pour la fermeture-vente : le parcours récent de Philips s’inscrit de manière emblématique dans une dynamique de restructuration permanente. Des actifs "immobilisés" comme des travailleurs. En Belgique, ces derniers se chiffraient à quelque 4.400 en 2006, ils ne sont plus qu’environ 2.400 en 2013. La division téléviseurs de Bruges ? Vendue en 2002 à Jabil Circuit (TP Vision, ensuite). La division ampoules de Turnhout ? 2.500 salariés en 2005, moins de 1.000 en 2015. Les centres de distribution ? En 2010, Philips décide d’externaliser. Le site spécialisé dans le stockage optique de données à Hasselt ? Quelque 1.400 mises à pied entre 2001 et 2004, moins de 300 travailleurs restant en poste. À l’international, un même mouvement. En 2003, le PDG de Philips, Gerard Kleisterlee, pouvait se vanter d’avoir supprimé 35.000 emplois (15% du total), ajoutant que ’toute la production finira par être sous-traitée’ [4]. En 2011, rebelote : la direction annonce qu’elle va devoir se séparer de 4.500 personnes sur les 120.000 qu’elle emploie de par le monde. En 2012, elle rectifie le tir : ce n’est pas 4.500 mais 6.700 personnes qu’il fallait comprendre.
Conclusion provisoire. Poser une loupe sur Philips pour faire apparaître ce que la société a réellement dans le ventre n’est pas si simple. Le cas belge le démontre avec son montage à la poupée russe : 6 entités dont l’une (Philips Belgium) chapeaute les autres (filiales à 100%) ou s’y associe (cas d’Emgo, Siemens détenant l’autre moitié), la coupole étant elle-même filiale à 100% de la néerlandaise maison mère, la Koninklijke Philips Electronics N.V. En tableau, cela donne :
Actif | CA | Emploi | |
---|---|---|---|
PHILIPS BELGIUM | 1.332,2 | 404,7 | 691 |
PHILIPS INNOVATIVE APPLICATIONS | 517,8 | 491,6 | 1.587 |
PHILIPS INNOVATIVE TECHNOLOGY SOLUTIONS | 82,3 | 19,5 | 146 |
PHILIPS CONSUMER PRODUCTS | 26,5 | ||
PHILIPS PROPERTIES | 58,9 | 4,3 | |
Total | 2.017,7 | 920,1 | 2.424 |
EMGO 50% Philips | 14,8 | 41,9 | 134 |
Source : http://www.actionnariatwallon.be/ et calculs propres (données en Mio d’€ pour l’année 2011)
Pour fermer tout aussi provisoirement la boucle, il peut être intéressant de savoir, que Philips faisait partie, en 1985 et aux côtés de Total, Fiat, Solvay et Rhône-Poulenc, des multinationales fondatrices du lobby patronal AUME (Association pour l’union monétaire européenne, dissoute en 2002), dont son PDG Cor van der Klugt recevra la présidence et, autre signe de son poids, qui n’est donc pas seulement socioéconomique, que la société occupait en 2011, avec un chiffre d’affaires de quelque 25 milliards d’euros et 119.000 travailleurs, la 82 position dans le classement des 100 plus grandes entreprises européennes. Pour fermer la boucle, il peut être intéressant de noter que, en 1974, Philips figurait au 13ee rang des 50 plus grandes entreprises industrielles du monde sur la base de leur chiffre d’affaires [5] (Philips : 8 milliards de dollars) et employait alors quelque 400.000 travailleurs, pas loin de quatre fois plus qu’aujourd’hui… Dit autrement, dans le mouvement global de restructuration géoéconomique induit par le capitalisme des oligopoles généralisés, Philips n’est plus que l’ombre de ses splendeurs passées.
*Chercheur Gresea
Rydberg, Erik, "Philips", Gresea, mai 2015, texte disponible à l’adresse : http://www.mirador-multinationales.be/secteurs/mixte/article/philips
[1] Duncan Robinson, "Philips discovers breaking up is hard to do", Financial Times, 28 janvier 2015.
[2] Rapport annuel 2013 et calculs propres.
[3] Dépêche 6com du 1er septembre 2003, citant le journal Le Soir.
[4] Dépêche 6com du 9 janvier 2013, citant le Financieel Economische Tijd.
[5] Jan Bohets, Belgie en de multinationals, Davidsfonds-Leuven, 1975.
Actualités
-
7 septembre 2022
L’actu des entreprises
-
4 avril 2016
Philips éteint la lumière (pas lucratif)
-
29 octobre 2015
Lumileds (Philips), c’est chinois…
-
21 octobre 2015
Philips, Siemens, etc. : histoires d’ampoule
-
17 décembre 2012
Amende record pour le cartel tubes cathodiques