L’affaire reste vulnérable à une action en justice du concurrent évincé, le sud-africain Kumba (filiale d’Anglo-American), mais l’accord minier, officialisé le 25 février 2007, conclu entre Arcelor Mittal et les autorités du Sénégal donnant au premier, pour 2,2 milliards de dollars, une licence d’exploitation de 25 ans de quatre sites dans la région de Falémé, ne manque pas d’être instructif. Il s’agit, dit Arcelor Mittal, d’un "projet intégré". On dirait, ici, qu’il comporte des "compensations économiques". Pour faire fléchir le Sénégal et obtenir le minerai de fer convoité, Arcelor Mittal paie des trucs en plus. La construction d’un nouveau port près de Dakar et le doublement (+ 750 kilomètres) du réseau ferré, actuellement de 900 kilomètres. Ce n’est pas négligeable. De là à développer l’économie sénégalaise, faut pas rêver. Les autorités sénégalaises souhaitaient, aussi, que le projet conduise à la création d’installations sidérurgiques, afin de doter le pays de sa propre production mais, comme l’exprime Les Echos, là ; Arcelor Mittal "a calé". Son objectif, naturellement, c’est augmenter ses "actifs miniers" pour tendre vers une autosuffisance de 64% à l’horizon 2010, et ce afin de contrer l’oligopole des producteurs de minerai (3 sociétés contrôlent 70% du marché mondial) qui, fort de cette position, en a augmenté le prix de 72% en 2005 et à nouveau de 19% en 2006. Dans le jeu des grands opérateurs, "l’autosuffisance" (souveraineté économique) du Sénégal n’est pas à l’agenda.
Accord conclu, annonce Arcelor Mittal le 19 juillet 2007. Le projet, précise la presse, s’inscrit dans une stratégie d’autonomie du groupe sidérurgique face au quasi-monopole sur le minerai de fer (et sur la fixation de son prix) du trio mondial CVRD-Rio Tinto-BHP Billiton, ArcelorMittal visant à atteindre, d’ici à 2014, une autosuffisance de 75% (45% actuellement). D’autres projets, au Liberia, au Kazakhstan et au Mexique, devraient suivre. Le Sénégal obtiendra "un pourcentage de la production" (non spécifié), un "pas de porte" de 30 millions de dollars et, assure-t-on, 20.000 emplois nouveaux, dont 4.000 directs, ce qui ferait du sidérurgiste le premier employeur privé du pays.
Sources : L’Usine nouvelle du 19 juillet 2007 et Les Echos du 20 juillet 2007.
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