Le livre est sorti peu après le raid triomphal de Rupert Murdoch sur le Wall Street Journal et, au regard des critiques dont il a fait l’objet pour sa complaisance vis-à-vis des autorités chinoises en prenant d’assaut ce vaste marché, il illustre avec bonheur, via le cas du "système Murdoch", le fait que les plus puissantes multinationales n’arrivent pas toujours à mettre le monde à leurs pieds. Le magnat australien n’est pas invincible. En Chine, il s’est heurté à un os. Le titre de l’ouvrage choisi par son ancien collaborateur, Bruce Dover, l’indique d’emblée : "Rupert’s Adventures in China : How Murdoch Lost a Fortune and Found a Wife" (Les aventures de Rupert en Chine – ou Comment Murdoch a perdu une fortune et trouvé une épouse, édité par Mainstream Publishing). Son gros projet : mettre sur pied un réseau de télévision par satellite destiné à capter une bonne part du marché publicitaire – il pèse aujourd’hui 50 milliards de dollars – qui passe par le canal des télévisions publiques, un verrou que Murdoch espérait d’évidence faire sauter. Las ! Comme résume l’Economist : "Les Chinois l’ont encouragé, pour ensuite faire marche arrière. Au bout du compte, ils l’ont manœuvré en le battant à son propre jeu." Les Chinois, pas des ploucs, comme il l’apprendra à ses dépens. Les Chinois en face de Murdoch, note l’Economist, "étaient d’excellents businessmen, mais ils voulaient garder les profits chinois en Chine", bref, "le charme de Murdoch sous lequel sont tombées les plus hautes strates des gouvernements d’Australie, des États-Unis et de Grande-Bretagne est resté sans effet en Chine". Y compris lors de sa tentative d’étendre sa licence de TV par câble dans la province du Guangdong en ouvrant, en catimini, une tête de pont dans la province voisine : elle sera aussitôt fermée par les autorités : ce fiasco lui coûtera entre 30 et 60 millions de dollars. Mais, donc, Murdoch y a néanmoins trouvé, en guise de lot de consolation, une épouse, Wendi Deng, qui dirige aujourd’hui les opérations chinoises de MySpace. Une leçon ? L’État-nation reste encore, en matière économique, une valeur sûre en certains endroits du monde.

Source : The Economist, 26 janvier 2008.