Indignez-vous ! clamait il y a peu l’ancien résistant et déporté Stéphane Hessel. Qu’à cela ne tienne. En Espagne, des milliers de jeunes autoproclamés "indignés" le prendront au mot et occuperont en ce mois de mai 2011 les places principales du pays. "Nous ne sommes pas une marchandise Marchandise Tout bien ou service qui peut être acheté et vendu (sur un marché).
(en anglais : commodity ou good)
aux mains des politiciens et des banquiers" peut-on lire sur les bannières et pancartes.

Les "indignés" font pour la plupart partie de cette génération qui bénéficie de la plus grande proportion de diplômés qu’a connue le pays, mais qui est pourtant la première qui vivra moins bien que la précédente. Et pour cause ! La crise économique et les politiques d’ajustement menées par le gouvernement espagnol sur insistance de l’Union européenne Union Européenne Ou UE : Organisation politique régionale issue du traité de Maastricht (Pays-Bas) en février 1992 et entré en vigueur en novembre 1993. Elle repose sur trois piliers : les fondements socio-économiques instituant les Communautés européennes et existant depuis 1957 ; les nouveaux dispositifs relatifs à la politique étrangère et de sécurité commune ; la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. L’Union compte actuellement 27 membres : Allemagne, Belgique, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas (1957), Danemark, Irlande, Royaume-Uni (1973), Grèce (1981), Espagne, Portugal (1986), Autriche, Finlande, Suède (1995), Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, Slovaquie, Slovénie, Tchéquie (2004), Bulgarie, Roumanie (2007).
(En anglais : European Union)
ont fait chuter les indicateurs sociaux. Le taux de chômage a explosé et frappe 4,9 millions de personnes, soit près de 20% de la population. Pour les moins de 25 ans, il est de 40,5 %. La plupart des jeunes entre 20 et 30 ans vivent avec 600 euros en travaillant à gauche et à droite et se voient obligés d’habiter chez leurs parents. Il y a de quoi s’indigner. Surtout si l’on ajoute à cela l’augmentation de 10% du tarif de l’électricité et du gaz, la hausse de la TVA, le gel des salaires pour les fonctionnaires et les retraités, le nombre croissant des saisies d’habitations et la réforme des retraites repoussant l’âge de la retraite à 67 ans, et prévoyant une pension pour les futurs retraités inférieure de 20% à la pension actuelle. (l’Humanité du 20 mai 2011)

C’est ainsi que d’une vingtaine de personnes décidées à occuper la plaça del Sol à Madrid à l’issue de la manifestation du 15 mai, le mouvement est passé à des dizaines de milliers occupant une centaine de places du Royaume avec pour mot d’ordre "Démocratie réelle maintenant !".
Rejet envers un système politique fondé sur l’alternance du PP et du PSOE qui aboutit, dans un cas comme dans l’autre, à des politiques ultralibérales, cet appel à une "vraie démocratie" incarne la recherche d’une autonomie, d’espaces où le peuple exerce lui-même son pouvoir. D’ailleurs, qui dit démocratie, dit pouvoir populaire, traduction littérale des termes grecs démos et kratos. C’est dans cette optique que ce mouvement fait revivre le concept des assemblées générales et populaires où tout est discuté sur le mode participatif.

Classées en huit volets, on peut lire sur le site de la plateforme " ¡Democracia real ya !" certaines propositions surgies de ces assemblées (http://www.democraciarealya.es/?page_id=234) : abolition des privilèges de la classe politique, lutte contre le chômage, droit au logement, services publics de qualité, contrôle public des banques, réforme fiscale, mécanismes de démocratie participative et réduction des dépenses militaires. Tout cela rappelle fort le "programme" de la Commune de Paris, dont on fête cette année le 140e anniversaire. Dans une moindre mesure, le mouvement s’étend néanmoins aussi à la Belgique où des campements sont installés à Gand, Liège et Bruxelles.