Reportage éclairant que celui que Libération livre sur les méandres de la sous-traitance
Sous-traitance
Segment amont de la filière de la production qui livre systématiquement à une même compagnie donneuse d’ordre et soumise à cette dernière en matière de détermination des prix, de la quantité et de la qualité fournie, ainsi que des délais de livraison.
(en anglais : subcontracting)
chez Arcelor, à Dunkerque. Les travailleurs de la sous-traitance s’élèvent à entre 1.800 et 2.000 salariés, contre 3.500 agents employés directement par le groupe sidérurgiste. C’est plus d’un sur trois. Au fil des années, Arcelor s’est progressivement débarrassé du parc à ferraille, de l’atelier de réparation des wagons, des pontiers de laminage, des ouvriers des portiques (ceux-là mêmes qui avaient décroché dans les années septante un statut de dockers) et de maintenance, pour confier ces tâches à des sous-traitants qui, eux-mêmes, les sous-traitent à de plus petites entreprises. Tel ouvrier (1.000 euros par mois) est un ex-travailleur Sin & Stes, repris par Renosol, filiale du groupe Dalkia, lui-même sous-traitant d’Arcelor... Scénario opaque, sur lequel Arcelor offre peu de lumière : "Chaque année, on ferraille avec la direction pour obtenir des chiffres qui n’apparaissent nulle part," dit Philippe Collet, secrétaire syndical CGT. Résultat, les ouvriers, eux-mêmes, ne savent plus pour qui ils travaillent ou sous quel statut. Opaque mais rentable, puisqu’il permet à Arcelor de mettre en concurrence les entreprises candidates (c’est à qui offre le prix le plus avantageux) et, par effet de ricochet, des travailleurs qui, auparavant, bénéficiaient d’un même statut chez Arcelor. C’est, dit Collet, "le principe de la sous-traitance. On oppose les salariés entre eux." Ajouter les effets pervers : Arcelor ne badine pas avec la sécurité, certes, mais le groupe sidérurgiste en fait reposer la responsabilité sur les sous-traitants, qui risquent d’être "black-listés" s’ils sont trop souvent cause d’accidents. D’où, naturellement, croissance des accidents non signalés, évacués clandestinement vers l’hôpital le plus proche, s’il y en a un...
Source : Libération du 23 octobre 2006