Cet été 2011, le bourgmestre (open VLD) de Saint-Trond proposait de mettre gratuitement à contribution les chômeurs pour ramasser les fruits abîmés par les intempéries. C’est désormais au tour de l’entreprise pétrochimique suisse Inéos de nous ramener à la préhistoire sociale, en remettant le travail forcé au goût du jour. À la suite d’un désaccord en septembre 2011 avec la direction portant sur une convention collective, les travailleurs du site d’Inéos, situé à Feluy (Hainaut), ont entamé un mouvement de grève. Inacceptable pour la direction, qui pointe des dangers sécuritaires (site classé en catégorie de haute sécurité Seveso 2) et la nécessité d’une présence sur place. Elle se tourne alors vers les autorités provinciales, seules habilitées à émettre des ordres de réquisition exceptionnelle en cas de nécessité impérieuse. Le jour du débrayage, 46 ouvriers d’Inéos sont réveillés par des policiers, armés et en uniforme. Forts de leur ordre de réquisition, ils intiment aux travailleurs de rejoindre leur lieu de travail sous peine de poursuites judiciaires. Du jamais vu chez les travailleurs, chez qui la réquisition efface quelque peu le mot d’ordre premier de la grève. Pour le délégué FGTB Julien Allard, l’argument sécuritaire n’est qu’un paravent de plus pour masquer une "attaque sans précédent contre le droit de grève". La direction d’Inéos s’en défend, arguant qu’il s’agit tout simplement d’appliquer des dispositions de sécurité minimales. Faux, rétorquent les grévistes, qui assurent avoir pris toutes les mesures de prévention nécessaires pour assurer la sécurité du site. La persévérance des travailleurs aura finalement payé : sur recours au Conseil d’État, l’ordre de réquisition sera annulé, permettant aux ouvriers de poursuivre la grève. Après une semaine, elle débouchera sur un accord de légère revalorisation salariale. Épilogue heureux mais victoire en demi-teinte : le Conseil d’État n’a motivé sa décision que sur la forme (ordre de réquisition pas assez motivé) et non sur le fond... Bien peu de garanties, donc, pour que ces pratiques d’un autre siècle ne se reproduisent pas.

Sources : Journal télévisé de la RTBF des 14, 19, 20 et 24 octobre.[!sommaire]