Dans son édition du 28 août 2011, le Sunday Times révélait que Vitol, le plus grand "trader" de pétrole au monde, a joué un rôle crucial dans la rébellion libyenne en l’alimentant à crédit en combustibles. Vitol escompte se faire payer (la facture s’élèverait à plusieurs centaines de millions de dollars) après le départ de Kadhafi. Idem avec British Petroleum qui possède depuis 2007 une concession d’exploration au large des côtes de la Libye dont la taille est équivalente au territoire de la Belgique. Mais Vitol, donc, bat pavillon suisse. Une Suisse qu’on dit neutre. Sa façade et ses facilités fiscales protègent cependant les super-marchands. Le groupe Vitol, basé à Genève, a été fondé en 1966 à Rotterdam. Il achète et revend des produits énergétiques, mais surtout du pétrole. C’est ainsi qu’il s’est activement engagé à aider la rébellion en Libye. Début avril, ce groupe affrétait le premier navire pour charger du pétrole libyen à l’est du pays, dans la zone de Tobrouk. La rébellion révélait par la suite qu’elle avait gagné 129 millions de dollars grâce à la vente de ce lot. Trois semaines plus tard, Vitol ravitaillait la rébellion en gasoil. Le carburant était chargé à l’île de Malte dans le tanker Delos, lui aussi affrété par Vitol. Par définition, ce marchand prend l’argent où il peut. En 2010 il a été chargé par Washington de livrer du pétrole raffiné à l’Iran en dépit de l’embargo américain. Cela n’a pas empêché Vitol, en juillet 2011, d’acheter 4 millions de barils de la réserve stratégique des États-Unis et au même temps de reprendre le commerce avec l’Iran. Le groupe Vitol est fermé, comme c’est souvent le cas pour des marchands ("traders") et est entre les mains d’un nombre restreint de propriétaires. Il ne publie pas de chiffres. Mais, selon l’agence Reuters, ses revenus étaient de 143 milliards de dollars (99 milliards d’euros) en 2009. La puissance de ce groupe dépasse l’imagination. Début 2010, il possédait 25% du pétrole transporté par navire sur les océans du monde. Mais l’exploit majeur date de 2008, au moment où le prix du baril de pétrole grimpait rapidement. Le 6 juin 2008, Vitol avait amassé des achats de pétrole qui totalisaient 57,7 millions de barils, "soit trois fois la consommation quotidienne des États-Unis", comme un observateur l’a fait observer. Ce "trader" spéculateur peut donc littéralement prendre en otage des pans entiers de l’économie mondiale.[!sommaire]