Comment ça, les États seraient démunis pour réglementer les puissances économiques !? Coup sur coup, l’actualité récente vient d’apporter la preuve du contraire, en Russie et en Grande-Bretagne. Dans la Moscovie, rapporte Le Figaro (20 novembre 2014), le Parlement a voté d’urgence une modification du Code fiscal visant à imposer, en Russie, les bénéfices officiellement déclarés dans d’autres juridictions fiscales ("offshore" de type île de Man, par exemple), et ce quelle que soit la destination finale de ces revenus, dividendes, réinvestissement dans l’entreprise ou placements "dormants". La mesure devrait conduire au rapatriement de quelque 86 milliards d’euros. En Grande-Bretagne, c’est le ministre des Finances George Osborne qui fait la Une du Financial Times (4 décembre 2014) avec – pavé dans la mare – son projet de "Google tax" : la multinationale hégémonique sur Internet figure en effet parmi les praticiens les plus agressifs de l’ingénierie fiscale. L’idée est ici grosso modo la même : frapper d’une taxe de 25% les bénéfices qui, bien qu’engrangés par les multinationales en Grande-Bretagne, sont artificiellement transférés sous des cieux plus cléments, fiscalement s’entend. L’affaire devrait rapporter au Trésor quelque 1,3 milliard d’euros. L’amusant est, d’une part, que Londres va manifestement plus loin que les projets de réforme fiscale en cours à l’OCDE (ce qui fait un peu grincer) et, d’autre part, que le risque d’une riposte des sociétés ciblées au motif que la mesure enfreindrait l’interdiction de double imposition devrait pouvoir être écartée, dixit un expert de KPMG (une des quatre boîtes mondiales dans le business de l’audit), en qualifiant la taxe non pas comme un impôt sur les entreprises mais, ouvrez les guillemets, sur "des profits supposés" ("deemed profits"). Subtil. Affaire à suivre...[!sommaire]