Ceci n’est pas à la portée de premier petit artisan. Vendre une crème glacée dont 60% du poids (et donc de son prix) est de l’air. Pour y arriver, il faut être grosse multinationale, genre Unilever – qu’on trouve derrière les "étiquettes" (fausses marques de fabrique) Carte d’or, Magnum, Miko ou Viennetta. L’astuce est astucieuse et porte le nom, bien connu des seuls ingénieurs, de foisonnement, un processus industriel qui permet en l’espèce d’injecter dans la crème glacée un maximum d’air sous forme de microbulles – sous prétexte, dixit Unilever, défense de rire – d’en améliorer l’onctuosité. Le résultat est le suivant : le litre de crème enrichi de ces microbulles va ainsi peser, non 1,2 kilos comme autrefois, mais seulement 700 grammes, le reste, 480 grammes (60%) n’étant donc que de l’air, que le consommateur va payer cash. Sans le savoir, bien entendu, car l’étiquetage réglementaire n’oblige pas le producteur d’indiquer le poids réel de sa marchandise frelatée, mais seulement son "volume". On comprend dès lors l’émoi du secteur de la glace industrielle lorsque la Commission européenne lui a fait obligation de renseigner désormais le poids net de glace. C’était en 2011. Bon prince, la Commission lui avait cependant accordé un sursis de cinq ans pour "anticiper" la chose. (Cette information provient de la chronique de salubrité publique "Conflit de canard" que publie chaque semaine le Canard enchaîné, à consommer sans modération : c’est une des rares tribunes dénonçant la malbouffe orchestrée par les transnationales de l’agroalimentaire.)

Source : Canard enchaîné, 6 août 2014.
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