L’escroquerie organisée à grande échelle par Volkswagen (qu’on rebaptisera volontiers Betrugswagen, en français Fraudewagen) n’en finit pas d’élargir les cercles du scandale, David Bach allant jusqu’à (FT du 28/9) le comparer à celui d’Enron, coulé corps et biens en 2001, pour supputer l’éventuelle disparition du géant automobile allemand ou, à tout le moins, des pertes d’emploi massives : les automobiles diesel, radicalement ternies désormais, ont beau ne représenter que 5% du marché Marché Lieu parfois fictif où se rencontrent une offre (pour vendre) et une demande (pour acheter) pour un bien, un service, un actif, un titre, une monnaie, etc. ; un marché financier porte sur l’achat et la vente de titres ou d’actifs financiers.
(en anglais : market)
états-unien, ils en détiennent plus de 50% en Europe, subsides publics aidant, au motif que le combustible serait plus "propre".

Pour mémoire et pour recadrer l’enjeu, Volkswagen est le fleuron numéro un de l’économie allemande, devançant de loin les neuf autres du peloton de tête avec un chiffre d’affaires Chiffre d’affaires Montant total des ventes d’une firme sur les opérations concernant principalement les activités centrales de celle-ci (donc hors vente immobilière et financière pour des entreprises qui n’opèrent pas traditionnellement sur ces marchés).
(en anglais : revenues ou net sales)
2014 de 203 milliards d’euros (le n°2, Daimler, n’en fait que 130, le n°7, Siemens, que 72), et c’est donc l’image de marque de la première économie de l’Union européenne Union Européenne Ou UE : Organisation politique régionale issue du traité de Maastricht (Pays-Bas) en février 1992 et entré en vigueur en novembre 1993. Elle repose sur trois piliers : les fondements socio-économiques instituant les Communautés européennes et existant depuis 1957 ; les nouveaux dispositifs relatifs à la politique étrangère et de sécurité commune ; la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. L’Union compte actuellement 27 membres : Allemagne, Belgique, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas (1957), Danemark, Irlande, Royaume-Uni (1973), Grèce (1981), Espagne, Portugal (1986), Autriche, Finlande, Suède (1995), Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, Slovaquie, Slovénie, Tchéquie (2004), Bulgarie, Roumanie (2007).
(En anglais : European Union)
qui, en tant que telle, se voit aspirée dans l’œil du cyclone.

À l’origine, on le sait, l’aveu par Volkswagen, le 3 septembre 2015, que la fraude constatée par l’Agence de protection américaine (EPA) est conforme aux faits. Fraude diabolique s’il en est puisqu’il s’agit, installé sur plus de 11 millions de véhicules diesel, d’un petit logiciel truqueur (pas un bidule physique, juste quelques lignes de programmation) qui, lors de tests en laboratoire, les déjouent pour afficher des taux d’émissions polluants inférieurs à ceux exigés par la loi, plus stricte aux États-Unis qu’en Europe.

Comme l’écrit Die Zeit, l’ordre d’exécution [1] ne peut avoir été donné qu’au top, le PDG Martin Winterkorn [2] et, sans doute, ses lieutenants chargés du développement du marché, Hans-Jacob Neuβer et Ulrich Hackenberg : chercher une responsabilité plus bas ? "Inconcevable", juge le journal, sans se poser la question : et plus haut ?

L’énorme de l’affaire est en effet que les signaux d’alerte n’ont pas manqué. En 2011, des chercheurs britanniques avaient averti leur gouvernement de ce que les polluants émis par les véhicules diesel étaient quatre fois plus élevés sur route que ce que semblait indiquer les "tests" officiels. Le Premier ministre David Cameron, sur simple coup de fil d’Angela Merkel, son confrère allemand, acceptera de différer l’introduction de normes plus strictes.

Pour l’heure, les pénalités dues à l’EPA aux États-Unis (outre les incriminations pénales) risquent de s’élever à 18 milliards de dollars et c’est sans compter les quelque 50 États d’Amérique du Nord qui vont suivre le mouvement avec, en parallèle, au moins autant d’actions en justice collectives à l’instigation de consommateurs lésés… Ce lundi 28 septembre, Le Temps de Genève annonce que l’Espagne (un demi-million de véhicules diesel truqués) compte embrayer. Pour une tache d’huile, c’en est une.

Sources : Financial Times (FT, dates diverses), The Sunday Telegraph du 27 septembre 2015, Die Zeit du 24 septembre 2015, Le Temps du 28 septembre 2015 (en ligne) et le Wall Street Journal de ce même lundi 28 septembre.

Notes

[1Établir la responsabilité des uns et des autres supposera, note le FT (26/9), de "brasser des téraoctets (1.000 milliards octets de mémoire, Ndlr) de courriels, documents et messages électroniques." Ce lundi 28 septembre 2015, reprenant une information du Bild am Sonntag, le Wall Street Journal livre l’information selon laquelle le fabricant de composants automobiles Robert Bosch a fourni le logiciel truqueur tout en précisant bien, par un courrier adressé à Volkswagen en 2007 (!), que "l’utilisation projetée de celui-ci serait illégale".

[2Entretemps démissionnaire. Parachute doré : 32 millions d’euros. Pour services rendus ?