La règle fondamentale au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce Organisation mondiale du Commerce Ou OMC : Institution créée le 1er janvier 1995 pour favoriser le libre-échange et y ériger les règles fondamentales, en se substituant au GATT. Par rapport au GATT, elle élargit les accords de liberté à des domaines non traités à ce niveau jusqu’alors comme l’agriculture, les services, la propriété intellectuelle, les investissements liés au commerce… En outre, elle établit un tribunal, l’organe des règlements des différends, permettant à un pays qui se sent lésé par les pratiques commerciales d’un autre de déposer plainte contre celui-ci, puis de prendre des sanctions de représailles si son cas est reconnu valable. Il y a actuellement 157 membres (en comptant l’Union européenne) et 26 États observateurs susceptibles d’entrer dans l’association dans les prochaines années.
(En anglais : World Trade Organization, WTO)
(OMC OMC Organisation mondiale du Commerce : Institution créée le 1er janvier 1995 pour favoriser le libre-échange et y ériger les règles fondamentales, en se substituant au GATT. Par rapport au GATT, elle élargit les accords de liberté à des domaines non traités à ce niveau jusqu’alors comme l’agriculture, les services, la propriété intellectuelle, les investissements liés au commerce… En outre, elle établit un tribunal, l’organe des règlements des différends, permettant à un pays qui se sent lésé par les pratiques commerciales d’un autre de déposer plainte contre celui-ci, puis de prendre des sanctions de représailles si son cas est reconnu valable. Il y a actuellement 157 membres (en comptant l’Union européenne) et 26 États observateurs susceptibles d’entrer dans l’association dans les prochaines années.
(En anglais : World Trade Organization, WTO)
) est celle de la non-discrimination, traduite au premier chef par la règle du traitement " de la nation la plus favorisée " (NPF). Cette règle est mentionnée dans l’Accord général sur le commerce des marchandises (GATT GATT Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce : Traité entré en vigueur en 1948, suite au refus du Congrès américain de constituer une organisation internationale du commerce. Ne pouvant obtenir une institution, les pays se sont contentés de conventions revues et corrigées lors de moments privilégiés, les « rounds », en vue de favoriser le libre-échange. Le GATT ne concernait que les produits manufacturés. Il y a eu en tout huit « cycles », le premier signé en 1947 par 23 gouvernements, le dernier, l’Uruguay round, destiné à créer l’OMC, après huit ans de négociations, en 1994 par 120 nations.
(En anglais : General Agreement on Tariffs and Trade, GATT)
, art. 1er) et dans l’Accord général sur le commerce des services (AGCS AGCS Accord général sur le commerce des services : Partie du traité de l’OMC traitant des services et visant la libéralisation la plus complète de ceux-ci. Contenue dans l’annexe 1B de l’accord général, il incite chaque pays à expliciter ce qu’il est prêt à libéraliser, tout en laissant une marge de manœuvre pour définir les « services fournis dans l’exercice du pouvoir gouvernemental » qui pourraient échapper à la concurrence internationale.
(En anglais : General Agreement on Trade in Services, GATS)
, art. 2).

Selon cette règle, si un Etat accorde à un ou plusieurs autres Etats des préférences commerciales - par exemple sous forme d’exemption ou de réduction de droits de douane à l’importation de ses produits - il doit, immédiatement et sans condition, étendre cette faveur commerciale à tous les autres Etats Membres de l’OMC OMC Organisation mondiale du Commerce : Institution créée le 1er janvier 1995 pour favoriser le libre-échange et y ériger les règles fondamentales, en se substituant au GATT. Par rapport au GATT, elle élargit les accords de liberté à des domaines non traités à ce niveau jusqu’alors comme l’agriculture, les services, la propriété intellectuelle, les investissements liés au commerce… En outre, elle établit un tribunal, l’organe des règlements des différends, permettant à un pays qui se sent lésé par les pratiques commerciales d’un autre de déposer plainte contre celui-ci, puis de prendre des sanctions de représailles si son cas est reconnu valable. Il y a actuellement 157 membres (en comptant l’Union européenne) et 26 États observateurs susceptibles d’entrer dans l’association dans les prochaines années.
(En anglais : World Trade Organization, WTO)
. " Si je donne à un, je donne à tous ! "
Les Accords de Lomé n’étaient pas conformes à cette règle fondamentale de l’OMC, l’UE UE Ou Union Européenne : Organisation politique régionale issue du traité de Maastricht (Pays-Bas) en février 1992 et entré en vigueur en novembre 1993. Elle repose sur trois piliers : les fondements socio-économiques instituant les Communautés européennes et existant depuis 1957 ; les nouveaux dispositifs relatifs à la politique étrangère et de sécurité commune ; la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. L’Union compte actuellement 27 membres : Allemagne, Belgique, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas (1957), Danemark, Irlande, Royaume-Uni (1973), Grèce (1981), Espagne, Portugal (1986), Autriche, Finlande, Suède (1995), Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, Slovaquie, Slovénie, Tchéquie (2004), Bulgarie, Roumanie (2007).
(En anglais : European Union)
s’engageant, par ces accords, à favoriser - notamment pour ce qui concerne la perception de droits de douane - les produits importés des pays ACP, sans étendre ces faveurs à l’ensemble des membres OMC.

L’Accord de Cotonou Accord de Cotonou Convention conclue en 2000 entre l’Union européenne et 79 pays ACP pour succéder aux différents accords de Lomé. Elle vise avant tout à insérer les pays ACP dans l’économie mondiale en libéralisant les échanges, moyennant une aide conditionnée des États européens. Une clause a été ajoutée pour renvoyer chez eux les immigrés clandestins de ces pays en Europe. Le traité a été signé pour vingt ans, renouvelable tous les cinq ans.
(En anglais : Cotonou Agreement)
signé en juin 2000 comme successeur du " Lomé IV " est caractérisé, dans son volet commercial, par une décision de suppression de ces préférences communautaires non réciproques à partir du 1er janvier 2008 au plus tard. D’ici janvier 2008, " les parties conviennent de conclure de nouveaux accords commerciaux compatibles avec les règles de l’OMC, en supprimant progressivement les entraves aux échanges entre elles et en renforçant la coopération dans tous les domaines en rapport avec le commerce ". Ces nouveaux accords commerciaux compatibles avec les règles de l’OMC sont appelés des " Accords de Partenariat Economique " (APE).

De là à dire que la suppression des préférences commerciales non réciproques est une exigence " juridique " à laquelle l’Union Européenne Union Européenne Ou UE : Organisation politique régionale issue du traité de Maastricht (Pays-Bas) en février 1992 et entré en vigueur en novembre 1993. Elle repose sur trois piliers : les fondements socio-économiques instituant les Communautés européennes et existant depuis 1957 ; les nouveaux dispositifs relatifs à la politique étrangère et de sécurité commune ; la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. L’Union compte actuellement 27 membres : Allemagne, Belgique, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas (1957), Danemark, Irlande, Royaume-Uni (1973), Grèce (1981), Espagne, Portugal (1986), Autriche, Finlande, Suède (1995), Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, Slovaquie, Slovénie, Tchéquie (2004), Bulgarie, Roumanie (2007).
(En anglais : European Union)
(UE) doit se plier d’une part et que des APE tels que suggérés par l’UE doivent par conséquent être conclu d’autre part, il n’y a qu’un pas ; un pas peut-être un peu rapide… Examinons cela de plus près.
Partant de la règle fondamentale de l’OMC de la NPF, il peut être utile de commencer par rappeler que cette règle n’est pas absolue.

Une première grande exception à cette règle de la NPF - inscrite dans le système normatif de l’OMC - est précisément justifiée par la disparité des rapports de force entre des grandes puissances commerciales et des pays plus isolés et moins développés économiquement : l’OMC accorde à tout Membre de l’Organisation le droit d’accorder certaines préférences commerciales aux seuls pays en développement, ainsi que certaines préférences commerciales plus fortes encore aux pays reconnus par l’ONU ONU Organisation des Nations Unies : Institution internationale créée en 1945 pour remplacer la Société des Nations et composée théoriquement de tous les pays reconnus internationalement (193 à ce jour). Officiellement, il faut signer la Charte de l’ONU pour en faire partie. L’institution représente en quelque sorte le gouvernement du monde où chaque État dispose d’une voix. Dans les faits, c’est le Conseil de sécurité qui dispose du véritable pouvoir. Il est composé de cinq membres permanents (États-Unis, Russie, Chine, France et Grande-Bretagne) qui détiennent un droit de veto sur toute décision et de dix membres élus pour une durée de deux ans. L’ONU est constituée par une série de départements ou de structures plus ou moins indépendantes pour traiter de matières spécifiques. Le FMI et la Banque mondiale, bien qu’associés à ce système, n’en font pas officiellement partie.
(En anglais : United Nations, UN)
comme faisant partie des pays les moins avancés Pays les moins avancés ou PMA : Catégorie de nations créée en 1971 par l’ONU, regroupant les pays les moins développés socio-économiquement de la planète. Il existe trois critères pour classer un État dans les PMA : avoir un PIB par habitant inférieur à 900 dollars par an ; être manifestement en retard dans le développement humain ; être vulnérable économiquement. Sur base de ces indicateurs, il y a actuellement 48 pays dans ce groupe (contre 25 en 1971). Les PMA bénéficient normalement de conditions meilleures dans le cadre de l’aide au développement.
(En anglais : Least Developped Countries, LDC)
(PMA).

C’est la CNUCED CNUCED Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement : Institution des Nations unies créée en 1964, en vue de mieux prendre en compte les besoins et aspirations des peuples du Tiers-monde. La CNUCED édite un rapport annuel sur les investissements directs à l’étranger et les multinationales dans le monde, en anglais le World Investment Report.
(En anglais : United Nations Conference on Trade and Development, UNCTAD)
, en 1968, qui adopte une résolution proposant que les pays industrialisés définissent à l’égard des pays en développement un " Système généralisé de préférences (SGP) ".

A cette époque, l’OMC n’existait pas encore, mais son précurseur - le GATT GATT Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce : Traité entré en vigueur en 1948, suite au refus du Congrès américain de constituer une organisation internationale du commerce. Ne pouvant obtenir une institution, les pays se sont contentés de conventions revues et corrigées lors de moments privilégiés, les « rounds », en vue de favoriser le libre-échange. Le GATT ne concernait que les produits manufacturés. Il y a eu en tout huit « cycles », le premier signé en 1947 par 23 gouvernements, le dernier, l’Uruguay round, destiné à créer l’OMC, après huit ans de négociations, en 1994 par 120 nations.
(En anglais : General Agreement on Tariffs and Trade, GATT)
de 1947 - était déjà en vigueur et comportait déjà en son article premier la règle du traitement de la nation la plus favorisée, interdisant aux Parties contractantes du GATT d’accorder des faveurs commerciales à certaines Parties contractantes du GATT sans les étendre à toutes les Parties contractantes du GATT. Dès 1971, les Parties contractantes du GATT ont approuvé une dérogation à l´article premier de l´Accord pour une période de 10 ans, afin que le système du SGP puisse entrer en application. Par la suite, une " dérogation permanente " fut instituée, via la clause dite d’habilitation, ainsi qu’a été baptisée la Décision de 1979 intitulée " Traitement différencié et plus favorable, réciprocité, et participation plus complète des pays en voie de développement ".

Cette " clause d’habilitation " a été reprise lors de la signature des Accords de Marrakech instituant l’OMC. Elle constitue le fondement juridique des SGP dans le cadre de l’OMC, permettant aux pays qui le souhaitent d’accorder - sans violer leurs obligations OMC - des préférences tarifaires (non réciproques) aux seuls pays en développement, avec un régime encore plus favorable pour les PMA.

Dans le cadre de l’adoption d’un système SGP, les pays peuvent donc appliquer un traitement préférentiel non réciproque (par exemple, des droits nuls ou faibles à l’importation) aux produits originaires des pays en développement.

Il existe actuellement 16 schémas nationaux de préférences généralisées notifiés au secrétariat de la CNUCED. Se sont dotés d´un schéma SGP les pays suivants : Australie, Bélarus, Bulgarie, Canada, Communauté européenne, États-Unis d´Amérique, Fédération de Russie, Hongrie, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pologne, République slovaque, République tchèque, Suisse et Turquie.

Les préférences commerciales accordées par l’UE aux pays ACP dans le cadre de leur accord de partenariat ne peuvent toutefois être justifiées de la sorte, comme faisant partie d’un SGP autorisé par l’OMC via la " clause d’habilitation ", puisque ces préférences commerciales s’appliquent aux seuls pays ACP, sans être étendues à l’ensemble des pays en développement.
La " clause d’habilitation " permet par ailleurs que plusieurs pays en développement adoptent entre eux des Accords Commerciaux Régionaux (ACR), pour s’octroyer, entre eux, des faveurs commerciales pour le commerce des marchandises, sans qu’ils doivent étendre ces préférences à tous les Membres OMC. A l’heure actuelle, 19 ACR notifiés au titre de la clause d’habilitation sont toujours en vigueur. C’est notamment sur base de cette " clause d’habilitation " qu’ont été approuvés par l’OMC les Accords d’intégration régionale COMESA, CEMAC et UEMOA.

A des conditions un peu différentes et un peu plus strictes, des ACR peuvent également être conclus entre des membres OMC qui ne sont pas tous " pays en développement ". Cette possibilité est prévue par l’article XXIV du GATT (complété par le Mémorandum d’Accord sur l’Interprétation de cet Article XXIV et par l’article V de l’AGCS AGCS Accord général sur le commerce des services : Partie du traité de l’OMC traitant des services et visant la libéralisation la plus complète de ceux-ci. Contenue dans l’annexe 1B de l’accord général, il incite chaque pays à expliciter ce qu’il est prêt à libéraliser, tout en laissant une marge de manœuvre pour définir les « services fournis dans l’exercice du pouvoir gouvernemental » qui pourraient échapper à la concurrence internationale.
(En anglais : General Agreement on Trade in Services, GATS)
).
L’article XXIV du GATT constitue ainsi, à côté de la clause d’habilitation, la seconde grande exception à l’obligation pour les Membres OMC de respecter la règle NPF.

La plupart des Membres de l’OMC sont maintenant aussi parties à des accords commerciaux régionaux (ACR). Le nombre, la portée et le champ d’application de ces accords se sont considérablement accrus, et leur nombre ne cesse d’augmenter. On estime que plus de la moitié du commerce mondial s’effectue maintenant dans le cadre d’accords commerciaux préférentiels. Des ACR sont en vigueur sur chaque continent. Parmi les plus connus, on peut citer notamment - outre ceux déjà mentionnés en parlant de la clause d’habilitation - l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA ALENA Accord de Libre-Échange Nord-Américain : Pacte signé en 1992 entre les États-Unis, le Canada et le Mexique visant à favoriser le commerce, les échanges et les investissements entre les trois pays. Il est entré en vigueur le 1er janvier 1994. Il dispose d’une clause permettant à des firmes privées de poursuivre les pouvoirs publics d’un des trois États pour non-respect des règles de libre concurrence.
(En anglais : North American Free Trade Agreement, NAFTA)
), ainsi que ceux ayant donné naissance à l’Union européenne (UE), à l’Association européenne de libre-échange (AELA), et au Marché commun du Sud (MERCOSUR Mercosur Traité de libre-échange et d’intégration économique entre l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay. Avec la signature de l’Accord d’Asuncion (Paraguay) du 26 mars 1991, ces quatre pays se sont engagés à intégrer leurs marchés dans le cadre du marché commun du cône sud (de l’espagnol : Mercado Común del Sur ou Mercosur). Le Venezuela y a adhéré en 2012. La Bolivie, le Chili, la Colombie l’Équateur et le Pérou en sont associés également.
(En anglais : Mercosur)
).

Jusqu’à présent, plus de 200 ACR ont été notifiés au GATT/à l’OMC. Parmi ceux-ci, 121 accords notifiés au titre de l’article XXIV du GATT, 19 accords notifiés au titre de la Clause d’habilitation et 12 accords notifiés au titre de l’article V de l’AGCS sont toujours en vigueur.
Pour qu’on puisse parler d’accord commercial régional au sens de l’article XXIV du GATT, il n’est pas indispensable que l’Accord soit conclu entre des pays situés tous dans une même région du monde, dans une même zone géographique.

L’Union européenne peut donc conclure avec un ou plusieurs pays d’Afrique, des Caraïbes ou du Pacifique par exemple des " accords commerciaux régionaux " qui soient légitimés par l’OMC en vertu de l’article XXIV du GATT.

L’Accord de Lomé ne pouvait toutefois être légitimé par l’OMC en vertu de cet article XXIV du GATT.
En effet, l’article XXIV du GATT subordonne le droit pour les Membres de conclure entre eux des ACR à une condition essentielle : que l’Accord conclu crée une " zone de libre échange " entre les Parties à l’Accord.

Pour qu’on puisse parler de " zone de libre-échange " au sens de l’article XXIV du GATT, il faut qu’entre les Parties à l’Accord, les droits de douane et les autres réglementations commerciales restrictives soient éliminés pour l’essentiel des échanges commerciaux portant sur les produits originaires des territoires constitutifs de la zone de libre-échange (GATT de 94, art. XXIV.8, b)).

Un système de type Lomé ne pouvait être considéré comme constitutif d’une zone de libre échange au sens de l’article XXIV du GATT, dans la mesure où les réductions tarifaires garanties dans l’Accord sont non réciproques, accordées unilatéralement par l’UE aux pays ACP.

Pour que leur Accord de partenariat - comprenant des préférences commerciales accordées par l’UE aux seuls pays ACP - soit reconnu par l’OMC, l’UE et les pays ACP ont dû user de leur droit, prévu dans l’Accord de Marrakech instituant l’OMC, de demander à l’OMC une dérogation, pour l’application de l’Accord de Lomé, à leur obligation de respecter le principe général de non-discrimination entre tous les membres de l’OMC en ce qui concerne les pratiques commerciales. L’Accord de Marrakech instituant l’Organisation mondiale du commerce Organisation mondiale du Commerce Ou OMC : Institution créée le 1er janvier 1995 pour favoriser le libre-échange et y ériger les règles fondamentales, en se substituant au GATT. Par rapport au GATT, elle élargit les accords de liberté à des domaines non traités à ce niveau jusqu’alors comme l’agriculture, les services, la propriété intellectuelle, les investissements liés au commerce… En outre, elle établit un tribunal, l’organe des règlements des différends, permettant à un pays qui se sent lésé par les pratiques commerciales d’un autre de déposer plainte contre celui-ci, puis de prendre des sanctions de représailles si son cas est reconnu valable. Il y a actuellement 157 membres (en comptant l’Union européenne) et 26 États observateurs susceptibles d’entrer dans l’association dans les prochaines années.
(En anglais : World Trade Organization, WTO)
prévoit en effet (art. IX.3) que dans des circonstances exceptionnelles, la Conférence ministérielle peut décider d’accorder à un Membre une dérogation à une des obligations qui lui sont imposées par les Accords de l’OMC.

L’Accord de Lomé ne pouvait être " reconnu " par les autres Membres OMC que moyennant l’obtention d’une telle dérogation. Et il a, effectivement, été reconnu, une dérogation ayant été négociée par l’Union européenne auprès des autres membres de l’OMC avec succès.
Plus précisément, en octobre 1996, les membres de l’OMC ont confirmé une décision prise par le GATT en 1994 et convenu d’une suspension de l’Article I du GATT en faveur de la quatrième Convention de Lomé Convention de Lomé Accord passé entre la Communauté économique européenne et de nombreux pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), 46 au départ en 1975, 70 en 1990. Ces accords prévoient un accès préférentiel des produits ACP aux marchés européens, une aide financière, ainsi qu’un certain nombre d’autres avantages. Ils ont été signés en 1975, puis renouvelés en 1979, 1984 et 1990. D’où les noms de Lomé I, II, III et IV pour désigner chaque fois le nouveau contrat conclu. En juin 2000, ils ont été remplacés par les accords de Cotonou.
(En anglais : Lomé Convention)
jusqu’au 29 février 2000 (date de la fin de la Convention Lomé IV). Par cette dérogation accordée, l’Union européenne fut donc autorisée - pour la durée de la quatrième Convention de Lomé - à accorder un régime tarifaire préférentiel aux produits originaires des Etats ACP sans devoir étendre ce régime préférentiel aux produits similaires provenant des autres membres de l’OMC.

Dans l’Accord de Cotonou, " les parties conviennent de conclure de nouveaux accords commerciaux compatibles avec les règles de l’OMC ".
L’UE et les ACP ont également convenu, dans l’Accord de Cotonou, que la conclusion entre eux d’APE conformes aux règles de l’OMC nécessiterait une période préparatoire, durant laquelle les préférences commerciales non réciproques appliquées dans le cadre de Lomé IV doivent être maintenues. Il est prévu dans l’Accord que cette période préparatoire prendra fin le 31 décembre 2007 au plus tard, les nouveaux accords devant entrer en vigueur le 1er janvier 2008 au plus tard.

Sur cette base, l’UE a demandé une nouvelle dérogation – temporaire - à l’OMC, pour les préférences tarifaires unilatérales qu’elle accorde aux États ACP au titre de l’accord de Cotonou. Cette dérogation lui a été accordée lors de la quatrième Conférence ministérielle de l’OMC à Doha (septembre 2001). La dérogation obtenue couvre la période allant du 1er mars 2000 au 31 décembre 2007, correspondant à la période préparatoire pour la conclusion d’APE UE-ACP.

L’Union européenne et les pays ACP auraient pu choisir de proroger dans l’Accord de Cotonou un système de préférences de type Lomé IV, et demander à l’OMC une nouvelle dérogation identique à la précédente, couvrant toute la durée de l’Accord de Cotonou.
Il est tout à fait possible que la dérogation nécessaire au maintien du système de Lomé, si elle avait été demandée, eût été accordée.

En effet, Lomé est loin d’être la seule dérogation accordée par l’OMC : il en existe près de cinquante, dont deux semblables à Lomé et qui concernent les relations des Etats-Unis et du Canada avec les Caraïbes (institutionnalisées par la loi des États-Unis relative au redressement économique du Bassin des Caraïbes et le programme CARIBCAN pour le Canada).

En outre, l’UE, en tant que deuxième puissance économique mondiale, représentant 15 Etats et bientôt 25, a un poids politique et juridique très important au sein de l’OMC, qu’elle pouvait utiliser pour tenter l’obtention d’une prolongation de la dérogation accordée pour Lomé. Ce poids politique et juridique de l’UE au sein de l’OMC grandit encore considérablement si elle s’adjoint dans ses revendications l’ensemble des Membres OMC qui font partie du groupe ACP. Ensemble, les Parties à l’accord de coopération ACP-UE sont majoritaires à l’OMC.

Il faut aussi souligner que le différend sur la banane, suite auquel l’UE a été condamnée pour son régime d’importation de bananes en provenance des ACP, n’a remis en cause ni la validité de la Convention de Lomé, ni le droit pour l’UE de maintenir ses préférences commerciales aux ACP jusqu’en février 2000, ni le droit pour l’UE de demander à l’OMC, dans le cadre d’un accord de coopération post-Lomé IV, une nouvelle dérogation prorogeant celle accordée pour Lomé IV. Les rapports du Groupe spécial et celui de l’Organe d’appel - qui confirme en substance les conclusions des premiers - ne sont en rien opposés au principe qui sous-tend la Convention de Lomé, vu la dérogation accordée. Ce que les organes de règlement des différends de l’OMC ont condamné dans ce dossier très célèbre concernait certains aspects très spécifiques du régime communautaire d’importation de bananes, relatifs aux systèmes de contingents tarifaires et d’octroi de licences. Les rapports du Groupe spécial et de l’Organe d’appel ont estimé que si la dérogation accordée autorisait bien les préférences tarifaires aux pays ACP, cela ne signifiait pas pour autant qu’elle permettait les autres incompatibilités.

Toutefois, il faut reconnaître que même si, vu la dérogation accordée, la validité de l’Accord de Lomé n’a pas été mise en cause par ce différend sur la banane, la condamnation claire par l’OMC de tous les aspects du régime qui ne rentraient pas dans le cadre strict de la dérogation accordée a inévitablement résonné comme un rappel cinglant de ce que les préférences communautaires non réciproques entre l’UE et les ACP ne sont permises que dans le cadre strict d’une dérogation accordée, et aussi longtemps que dure cette dérogation. L’obtention et le maintien d’une dérogation au respect des règles de l’OMC ne sont jamais acquis par avance, ce qui est peu confortable.

Se baser sur l’obtention et le maintien d’une dérogation aux règles fondamentales de l’OMC pour asseoir les bases d’un Accord de coopération important comprend nécessairement une certaine insécurité, dont l’ampleur doit être appréciée d’un point de vue politique.
L’affaire de la banane et l’évolution des négociations commerciales multilatérales dans le cadre de l’OMC ont, en l’occurrence, amené un certain sentiment d’insécurité par rapport à la possibilité de faire proroger - longtemps ou même un peu - la dérogation de Lomé IV.
La part de pertinence et de " prétexte pratique " du recours à ce " sentiment d’insécurité " pour asseoir le choix opéré par l’UE de ne pas demander une prorogation de la " dérogation Lomé " couvrant la " durée Cotonou " peut utilement être discutée.

Quoi qu’il en soit, en admettant même qu’il puisse y avoir une part de " pertinence " à ce sujet, une question essentielle à se poser - et qui nous permet de comprendre le véritable enjeu que représentent les nouveaux APE pour l’UE - serait alors : pourquoi l’UE n’a-t-elle pas plutôt choisi d’utiliser le poids juridique et politique dont elle dispose - seule déjà, encore plus avec les ACP (mais que les ACP, eux, ne disposent pas seuls) - pour adapter les règles de l’OMC et faire reconnaître comme conforme à ces règles son volet d’aide au développement que constituent ses préférences commerciales non réciproques aux ACP ?

L’idée de modifier les règles de l’OMC pour rendre des préférences de type Lomé tout simplement conformes aux règles de l’OMC n’est pas saugrenue.

Actuellement, des exceptions à la réciprocité sont déjà prévues dans le cadre de l’OMC. Elles se fondent sur la reconnaissance du fait que l’inégalité des partenaires dans le commerce justifie une différence dans les obligations en matière de libéralisation. Parmi ces exceptions à l’obligation de réciprocité, on a déjà mentionné celle, très générale, qui consiste en un droit pour tout pays d’accorder à l’ensemble des pays en développement un SGP. Il y en a d’autres, nombreuses, même si de portée limitée. L’Agenda de Doha pour le Développement (ADD) prévoit à ce titre que les dispositions OMC relatives au traitement spécial et différencié pour les pays en développement doivent être largement renforcées.

Conçu pour des accords commerciaux conçus entre pays de même niveau de développement économique, l’Article XXIV du Gatt, qui régit les accords commerciaux régionaux, ne fait aucune référence au traitement spécial et différencié pour les pays en développement. L’Article XXIV pourrait être modifié, en y intégrant la notion d’asymétrie dans la réciprocité. Elle reposerait sur la reconnaissance de la particularité d’accords commerciaux régionaux associant des pays développés et des pays en développement. En choisissant l’assouplissement des règles, on ferait d’un Accord du type Lomé non pas un système fermé, alternatif à l’OMC, mais plutôt un espace complémentaire, intégrant davantage les questions de développement.
Loin d’être au pied du mur, l’UE, en poussant à la conformité OMC au sein des ACP, poursuivrait-elle un objectif stratégique de renforcement de sa position de force au sein du commerce international ?

En cohérence avec cette vraisemblable volonté d’inscrire les pays ACP dans un processus de libéralisation profond qu’elle défend à l’OMC, l’UE exprime d’ailleurs, depuis le début des " négociations " et de plus en plus clairement, sa volonté d’obtenir une dérégulation des marchés ACP bien plus importante encore que ce qu’exige le respect des règles de l’OMC.

Entre les exigences de l’OMC, relatives à la nécessité d’obtenir une dérogation pour l’octroi de préférences commerciales non réciproques dans la seule mesure où elles ne sont pas généralisées à l’ensemble des pays en développement et susceptibles d’adaptation en fonction des volontés politiques des " Grands ", d’une part, et la pression de l’UE pour obtenir des ACP une libéralisation de leurs marchés plus importante que ce qu’exigent les règles actuelles de l’OMC, le fossé est grand. Mais quelle est la part de libre arbitraire dont disposent les ACP, économiquement dépendants de l’UE ?

 


Pour citer cet article :

Anne Graindorge, "La conclusion de zones de libre échange UE-ACP : une exigence de l’OMC ?", Gresea, janvier 2004. Texte disponible à l’adresse :
http://www.gresea.be/spip.php?article1639