Le cluster pétrochimique d’Anvers est le premier pôle de production chimique européen, et l’un des plus importants au monde. Cœur industriel de la Flandre, les raffineries et craqueurs [1] de Total, Ineos ou BASF constituent également le premier pôle d’émission de gaz à effet de serre (GES) de la Région flamande, et plus généralement de la Belgique. Au travers de cette étude, nous retracerons l’historique des activités pétrochimiques sur le port d’Anvers, avant de s’interroger sur la pertinence des nouveaux investissements proposés et leur compatibilité avec les objectifs climatiques affichés.

1re partie - historique
Pétrochimie : un développement tardif en Europe
La pétrochimie nait dans les années 1920 aux États-Unis. Il s’agit d’abord de valoriser les sous-produits de l‘industrie pétrolière. Au départ, le seul dérivé du pétrole utilisé est le fioul ; l’essence est alors brulée. Avec l’apparition de l‘automobile dans les années 1920-1930, les constructeurs sont en recherche d’un carburant pour des moteurs de plus en plus performants. L’industrie pétrolière développe de nouvelles technologies de « craquage [2] » qui permettent d’obtenir les carburants voulus, mais également d’autres sous-produits qui se révèlent intéressants en tant que matière première
Matière première
Matière extraite de la nature ou produite par elle-même, utilisée dans la production de produits finis ou comme source d’énergie. Il s’agit des produits agricoles, des minerais ou des combustibles.
(en anglais : raw material)
, notamment des produits chimiques [3] . En Europe, aucun pays n’a développé d’industrie pétrolière ou gazière à proprement parler durant la première moitié du XXe siècle, ce qui explique le peu de recherches dans la chimie des hydrocarbures à ce moment. Les chimistes européens se concentrent plutôt sur la chimie du charbon (carbochimie), très utilisée sur le continent.
Après 1945, la demande en pétrole explose, accompagnant la croissance
Croissance
Augmentation du produit intérieur brut (PIB) et de la production.
(en anglais : growth)
des trente glorieuses
Trente glorieuses
Période des trente années suivant la dernière guerre, entre 1945 et 1975, au cours de laquelle la croissance économique a atteint dans les pays occidentaux des taux très élevés, beaucoup plus élevés que dans les périodes antérieures. Ce taux élevé de croissance est essentiellement dû à la conjonction de plusieurs catégories de facteurs comme le progrès de la productivité, la politique de hauts salaires, la régulation par les pouvoirs publics, etc.
(En anglais : The Glorious Thirty)
. La pétrochimie européenne est balbutiante. Plusieurs facteurs vont participer à son développement. L’extraction du charbon commence à stagner sur le vieux continent, tandis que les gisements pétroliers et gaziers se multiplient. Dans les années 1950-60, le plan Marshall
Plan Marshall
Ensemble de dons et de crédits fournis par les États-Unis aux pays européens à partir de 1948 en vue de reconstruire le territoire dévasté par la guerre. Ce programme a été lancé par le secrétaire d’État de l’époque, le général George Marshall, le 5 juin 1947. Washington se donnait le droit de regard sur l’utilisation de ces fonds, ce qui lui permit de favoriser les investissements américains sur le vieux continent, ainsi que l’adoption des produits et habitudes de consommation américains. L’Est européen refusa ses conditions, ce qui coupa alors (et non auparavant) l’Europe en deux. L’aide était gérée à partir de l’Organisation européenne de coopération économique, dont étaient aussi membres les États-Unis et le Canada. Celle-ci deviendra l’OCDE en 1960.
(En anglais : Marshall plan)
[4] encourage le développement des infrastructures pétrolières. Par ailleurs, la demande en plastique, fibres ou caoutchouc synthétique se renforce.
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Pour citer cet article : Romain Gelin, "Port d’Anvers : la pétrochimie en question", Gresea, octobre 2023.
Photo : Marc Delforge, Complexe pétrochimique, Anvers, Flickr.