Le Sud parle au Sud
Le Sud, c’est par où encore ? Là-bas, Madame, l’escalier de service, 2e sous-sol, pas sûr que l’ampoule fonctionne encore. C’est émouvant. Oui, Monsieur, peut-être pourrions-nous envoyer une équipe de télévision, des colis alimentaires, trois pour le prix de deux, et puis quelques experts en bruitage médiatique. Ah, le Sud... Que d’horreurs sirupeuses en ton nom.
C’est un créneau, un business. Charité business, ils disent les Anglais. Dans les pays du capitalisme avancé, des milliers de gens en vivent.
Ils collectent de l’argent pour les pauvres. Ils dressent des statistiques. Ils échafaudent des programmes. Ils prononcent des discours sirupeux.
C’est une des caractéristiques fondamentales du Sud. Ils n’en ont pas à s’occuper là-bas. Le Nord a pris la direction des opérations.
Projets pour tout réformer. Projets pour réparer l’ampoule.
Projets pour apprendre des leçons par cœur. Projets pour imposer des bonnes pratiques. Projets pour remodeler les institutions.
Conseils d’un ami qui vous veut du bien...
Donc, c’est parfaitement normal. Lorsque le Sud parle, on n’écoute pas. Ils ont dit quelque chose ? Rien entendu. D’ailleurs, dans le journal, il n’y a rien. Et puis : de quoi ils se mêleraient, là ?
Cela fonctionne depuis longtemps comme cela. Le Sud s’est réuni à La Havane, en septembre, sommet des Pays Non Alignés (deux tiers de l’humanité) et personne n’a rien entendu.
Rien dans les journaux. Pas d’interviews. La Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced), arène des revendications du Sud, se prépare à reprendre ses travaux pour assurer au Sud un peu de marge de manœuvre politique et économique dans l’ordre international que lui dessinent les capitales occidentales – et personne n’entend rien. Silence radio. On veut au dire au Nord, là.
Un chercheur indien dresse la chronique de la mort annoncée de la Cnuced et c’est pas de vagues, auditoire vide. Il tente d’esquisser les pistes d’une renaissance de la Cnuced et c’est : même scénario. Ce numéro du GRESEA Echos veut contribuer à rééquilibrer un peu cette injustice et cette imbécillité.
L’imbécillité, surtout. Car le Sud parle et lorsqu’il parle, il parle au Sud. Il faudrait, donc, au minimum, écouter. Les appels à la résistance, pour un autre monde, ne sont plus des "Ici, Londres...". Ils viennent de Nairobi, de Beijing, de Caracas et de Téhéran.
Dit autrement, il faut écouter sous peine d’être largués. Les ampoules défectueuses, ils s’en fichent, et des réparateurs aussi. Ils pensent à autre chose. A leur propre émancipation, à leur capacité de forger leur propre destin. On en trouvera ici un mélange d’expressions. Puissent-elles être entendues.
Sommaire
- Edito : Le Sud parle au Sud (Erik Rydberg)
- Le Sud existe également… (Alejandro Kirk)
- Business au sommet des Non Alignés (Roger Hearing)
- L’Afrique veut redynamiser les Non Alignés (Joyce Mulamba)
- Non Alignés : renforcer les liens Sud-Sud (South Bulletin)
- Sud toute ! (South Bulletin)
- Un nouvel ordre humain international ? (Martin Khor)
- Les médias, haut-parleur de l’ordre occidental ? (Bruno Beauraind)
- Déclin et dépolitisation de la Cnuced (Muchkund Dubey)
- Comment redynamiser la Cnuced (Muchkund Dubey)
- La 12e Cnuced : retour aux origines (Bruno Beauraind)
Pour consulter la revue en ligne : https://issuu.com/gresea/docs/ge48r
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